Vivre avec la terre - Perrine & Charles HERVÉ-GRUYER

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tome  I

tome  II

tome  III

PERMACULTURE, éCOCULTURE :  LA NATURE NOUS INSPIRE

CULTURES VIVRIèRES ET FORÊTS-JARDINs

CRéEr UNE MICROFERME

Perrine & Charles hervé-gruyer

Le changement climatique s’accélère, la biodiversité s’effondre, notre modèle de civilisation vacille… N’est-il pas temps d’inventer ensemble une nouvelle manière d’habiter la Terre, en nous laissant inspirer par la nature ? À la Ferme biologique du Bec Hellouin, Perrine et Charles Hervé-Gruyer et leur équipe cherchent à subvenir aux besoins des humains tout en prenant soin de toutes les formes de vie. Ils y pratiquent l’écoculture, une nouvelle forme d’agriculture qui imite les écosystèmes naturels. Les recherches scientifiques ont validé les résultats de cette approche qui permet, grâce à des outils manuels simples et efficaces, de produire des légumes et des fruits d’une excellente qualité gustative et nutritive, avec des rendements qui peuvent être dix fois supérieurs, par unité de surface, aux rendements de l’agriculture biologique motorisée. Cette production généreuse s’accompagne d’une rapide augmentation de la fertilité des sols. Une microferme conçue selon l’approche du Bec Hellouin constitue un puits de carbone et une oasis de biodiversité. Plus qu’aucun autre ouvrage à ce jour, ce manuel pratique traite de très nombreux sujets : culture des légumes et des fruits, forêts-jardins, petit élevage, céréales jardinées, outillage, conception d’une microferme sous tous ses aspects… Il s’adresse à tous ceux, amateurs ou professionnels, qui désirent créer une ferme ou un jardin naturel et productif. Il guidera les premiers pas des débutants et accompagnera les professionnels avertis, des années durant.

manuel des jardiniers-maraîchers p e r m ac u lt u r e   -   é c o c u lt u r e   -   m i c r o f e r m e s

Cet ouvrage exceptionnel propose un art de vivre en harmonie avec la Terre. Il permet à chacun de s’engager concrètement en faveur du monde de demain. Créée par Charles et Perrine Hervé-Gruyer en 2003, la Ferme du Bec Hellouin, en Normandie, est devenue une référence internationale en matière de permaculture et d’écoculture. Les recherches qui s’y déroulent ont exercé une profonde influence sur l’agriculture biologique en France et inspiré la création de nombreuses fermes naturelles dans le monde entier.

ACTES SUD | FERME du BEC HELLOUIN ACTES SUD

ACTES SUD

ACTES SUD

FERME du BEC HELLOUIN

FERME du BEC HELLOUIN

FERME du BEC HELLOUIN


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Perrine & Charles HERVÉ-GRUYER

VIVRE AVEC  LA

TERRE TOME I PERMACULTURE, ÉCOCULTURE :  LA NATURE NOUS INSPIRE

ACTES SUD | FERME DU BEC HELLOUIN

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4 | MÉTHODES DE CULTURE

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À PROPOS DE CE LIVRE notre aventure paysanne, notre intention est de chercher avec vous une nouvelle manière d’habiter la Terre. Se rapprocher de la nature nous donne le pouvoir de transformer nos modes de vie, de gagner en cohérence tout en contribuant à restaurer l’intégrité de la biosphère. Vous trouverez dans ces pages : EN PARTAGEANT DANS CES PAGES

- DES CONCEPTS : ceux de l’écoculture, une forme d’agriculture qui s’inspire de la nature. – DES DONNÉES : cet ouvrage propose de très nombreuses informations sur les cultures vivrières. – DES TECHNIQUES : écologiques et très efficaces, elles permettent de concilier une régénération

du milieu naturel et une production de fruits et de légumes abondante et durable.

– UNE EXPÉRIENCE : celle de la ferme biologique du Bec Hellouin, où se déroulent divers pro-

grammes de recherches scientifiques.

– DES CONSEILS : pour réussir à créer vous-même un jardin ou une ferme permaculturels, dans

toutes sortes de contextes de sol et de climat.

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6 | À PROPOS DE CE LIVRE

UN PROJET LITTÉRAIRE La Ferme du Bec Hellouin est une petite ferme familiale initiée par mon épouse Perrine et moimême. J’ai tenu seul la plume pour écrire ce livre, mais il reflète notre aventure commune. Ce manuel est aussi un projet littéraire, car un livre aussi volumineux composé uniquement d’informations pratiques serait terriblement sec ! Un brin de poésie aide à digérer la technique. Nous avons émaillé le texte d’anecdotes et de réflexions reflétant notre quête de sens. En tant qu’auteur, il m’a semblé important de partager avec vous un peu de notre aventure humaine, d’entrouvrir la porte de notre jardin secret. Au risque de surprendre le lecteur, pour nous l’intention et les concepts sont plus importants que les données techniques. - L’intention donne le cap : c’est parce que Perrine et moi avions pour projet de vivre dans une intimité aussi profonde que possible avec la nature que nous avons exploré les solutions proposées par la permaculture, ce qui nous a conduits vers l’écoculture. - Les concepts sont tirés de l’observation de la nature. Ils sont globalement différents de ceux qui régissent l’agriculture depuis son apparition au Néolithique. - Les techniques découlent de l’intention et des concepts, elles sont multiples et peuvent s’adapter aux différents contextes géographiques. Chacun peut opter pour celles qui lui parlent.

UN MANUEL D’UN FORMAT EXCEPTIONNEL Nous avons voulu réaliser un livre différent de ceux qui existent déjà. Il nous a semblé pertinent de prendre le temps de traiter en profondeur des sujets encore méconnus. Nombre d’informations sont inédites car issues des recherches menées au Bec Hellouin. Nous avons également souhaité donner un aperçu rapide de sujets déjà bien traités dans la littérature existante, de manière que ceux qui découvrent les activités agricoles puissent se forger rapidement une vision globale. En plein accord avec nos amis et partenaires d’Actes Sud, nous avons donc consacré cinq années à la réalisation de ce manuel. Notre collaboratrice Camille Joyeux, agronome et docteur en pharmacie, a travaillé durant deux années pour collecter des informations dans la littérature technique et scientifique internationale. Ce manuel est donc le reflet de notre expérience de terrain et une synthèse des plus récentes avancées dans les sciences de l’environnement en lien avec nos thématiques. Le travail de maquette a été important et ce manuel n’aurait pu voir le jour sans l’infinie patience de notre talentueux maquettiste, Philippe Laborde.

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S’ADRESSER AU PLUS GRAND NOMBRE Cet ouvrage reflète l’aventure d’un couple de paysans qui vit et pratique au quotidien l’approche décrite dans ces pages. Toutefois, notre ferme n’est pas à copier, les références que nous faisons à notre expérience ne sont là que pour illustrer et ancrer notre récit. Tout comme notre précédent livre, ce manuel peut être utilisé par des paysans des deux hémisphères – nous avons donc constamment cherché à ne pas nous laisser enfermer dans les particularités de notre vallée de Normandie. Le choix de donner la priorité aux grands principes tirés de l’observation de la nature, valables en tous lieux, permettra à chacun d’adapter nos propositions à son contexte. Bien évidemment, lorsque nous parlons du nord ou de l’hiver, nous faisons référence à notre situation géographique et climatique. Ayant eu une scolarité difficile, j’ai du mal avec les données théoriques lorsqu’elles ne sont pas connectées aux réalités du terrain. J’ai constamment cherché à présenter les choses de manière aussi simple que possible. J’espère y être parvenu !

COMMENT UTILISER CE LIVRE ? Notre rêve est que ce manuel vous accompagne des années durant et qu’il vous facilite vraiment la vie ! Le débutant y trouvera les grands repères qui lui permettront d’initier son projet, l’expert une synthèse probablement unique au monde de données sur les cultures vivrières. Ce livre peut être abordé de deux manières : vous pouvez le lire de la première à la dernière page. Les chapitres très techniques peuvent être juste survolés lors de la première lecture, vous saurez qu’ils existent et pourrez y revenir ultérieurement en fonction de vos besoins. N’ayez pas peur du nombre de pages : vivre avec la terre, c’est se lancer dans une aventure complexe qui ne s’apprend pas en quelques lignes ou vidéos. Ce livre n’est pas destiné aux gens pressés ni à ceux qui surfent à la surface des choses ! Prenez votre temps, avancez “au pas du paysan”, c’est un luxe rare de nos jours. Vous pouvez également vous reporter à tel ou tel chapitre pour y glaner les informations que vous recherchez, selon vos besoins du moment. Ceux qui sont avides de solutions techniques préféreront peut-être faire l’impasse sur les concepts en première lecture. Nous vous recommandons cependant d’y revenir lorsque vous en aurez le temps et l’envie car nous nous sommes aperçus, au fur et à mesure des années, que c’est leur compréhension qui nous a permis de progresser techniquement. Nous avons fait le choix de redonner certaines informations importantes à plusieurs endroits du manuel, afin que les lecteurs ne passent pas à côté, quel que soit leur mode de lecture. La bibliographie permettra à ceux qui le désirent d’approfondir leurs recherches en fonction de leurs besoins. Nous espérons que ces pages vous communiqueront notre passion pour la nature et la Vie ! Réalisez vos rêves !

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TOME II CULTURES VIVRIÈRES ET FORÊTSJARDINS

TOME I

V. MÉTHODES DE CULTURE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 1 3

PERMACULTURE, ÉCOCULTURE : LA NATURE NOUS INSPIRE

29. LES BUTTES DE CULTURE

INTRODUCTION : VIVRE AVEC LA TERRE

34. IMPLANTATION DES CULTURES :

PERMANENTES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 1 5 30. LES BUTTES RONDES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 2 9 31. LES PLANCHES PERMANENTES PLATES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 3 9 32. AUTRES TYPES DE BUTTES PERMANENTES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 4 3 33. INTRODUCTION AUX CULTURES VIVRIÈRES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 4 9 SEMIS DIRECT OU REPIQUAGE ? . . . . . . . . . . . . 3 5 3

..................... 13

35. PRÉPARATION DU SOL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 57

I. NOURRIR LES HOMMES, GUÉRIR LA TERRE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 3

36. LES SEMIS EN PLACE (SEMIS DIRECTS) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 6 3

1. DE L’AGRICULTURE

15. LES CONCEPTS DU DESIGN

37. FAIRE SES PLANTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 6 9

À L’ÉCOCULTURE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 5

PERMACULTUREL .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 37

38. LES REPIQUAGES

2. LES PRINCIPES FONDATEURS

16. L’ESPRIT D’UN DESIGN

EN PLEINE TERRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 7

DE L’ÉCOCULTURE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 5

PERMACULTUREL .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 57

39. LES ARROSAGES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 8 3

3. L’ÉCOCULTURE : UN NOUVEAU

17. LE PROCESSUS DE DESIGN . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 6 3

40. LE DÉSHERBAGE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 8 9

PARADIGME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 3

18. LA BEAUTÉ SAUVERA LE MONDE .. . . . . 1 8 9

41. LES RÉCOLTES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 0 1

4. CHASSEUR, CUEILLEUR, PAYSAN . . . . . . . . . 47

19. LES DESIGNS DE LA FERME

5. LA FERME BIOLOGIQUE

DU BEC HELLOUIN .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 9 5

DU BEC HELLOUIN .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 3 6. LES PROGRAMMES DE RECHERCHE À LA FERME DU BEC HELLOUIN . . . . . . . . . . . . . . . 5 9

II. À L’ÉCOLE DE LA NATURE

IV. UNE APPROCHE NATURELLE DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

VI. DENSIFIER ET ASSOCIER LES CULTURES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 1 42. DENSIFIER LES CULTURES . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 3 43. LES ASSOCIATIONS DE CULTURES :

.................... 213

PRINCIPES ET REPÈRES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 9

20. LE SOL ET LES PAYSANS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 1 5

44. ASSOCIATIONS DE CULTURES : 35 EXEMPLES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 5 3

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

21. LA STRATÉGIE ORGANIQUE .. . . . . . . . . . . . . . 2 2 3

7. LE MURMURE DE LA VIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 9

22. LES PAILLIS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 2 9

8. LE SOLEIL, LE VENT, LA PLUIE . . . . . . . . . . . . . . 75

23. LES COMPOSTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241

9. LE SOL .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1

24. LES ENGRAIS VERTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 5 3

VII. CULTIVER TOUTE L’ANNÉE

10. DE L’ÉCOSYSTÈME

25. ENGRAIS ET AMENDEMENTS . . . . . . . . . . . . . 2 57

45. DES LÉGUMES

À L’AGROÉCOSYSTÈME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 0 3

26. MICRO-ORGANISMES UTILES,

EN TOUTES SAISONS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 97

11. LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES . . . . . . 1 0 9

BOKASHI ET BIOCHAR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 61

46. CULTURES SOUS ABRI :

12. LA BIODIVERSITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 1 3

27. MICROFERME ET FERTILITÉ . . . . . . . . . . . . . . . 2 7 1

LES ÉQUIPEMENTS SIMPLES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 0 5

13. LES PLANTES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 1 7

28. MICROFERMES,

47. CULTURES SOUS ABRI :

CARBONE, CLIMAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 79

LES SERRES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 0 9

III. DESSINE-MOI UNE FERME .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 2 9 14. INTRODUCTION À LA PERMACULTURE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 3 1

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NOTES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 9 0 ANNEXES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 9 3

............................. 495

48. LES COUCHES CHAUDES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 1 9 49. ORGANISER LA PRODUCTION DU JARDIN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 2 7 50. FRUITS ET LÉGUMES DE GARDE . . . . . . 5 3 3

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TOME III CRÉER UNE MICROFERME VIII. LES LÉGUMES

.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 4 5

XI. MULTIPLIER LES VÉGÉTAUX

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 761

51. LES PRINCIPALES CULTURES

72. DE LA REPRODUCTION

LÉGUMIÈRES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 47

DES PLANTES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 3

86. QUELLES ACTIVITÉS

73. PRODUIRE SES SEMENCES

POUR LES MICROFERMES ? .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 07

POTAGÈRES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 767

87. LA FERME

74. LA REPRODUCTION VÉGÉTATIVE :

ET SON ENVIRONNEMENT .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 1 1

52. LES LÉGUMES VIVACES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 9 5

BOUTURES, GREFFES, DIVISIONS,

88. LE “MOTEUR HUMAIN”

53. LES MINI-LÉGUMES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 0 1

MARCOTTES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 79

DE LA FERME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 1 5

IX. CULTURES SPÉCIFIQUES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 9 3

54. DES SALADES TOUTE L’ANNÉE . . . . . . . . 6 0 5

89. LES PRODUITS TRANSFORMÉS . . . . . . . . 9 2 3

56. LES TRÈS JEUNES FEUILLES,

XII. SANTÉ DU JARDIN ET BIODIVERSITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 8 7

LES MICRO-POUSSES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 5

75. SANTÉ ET VITALITÉ DU JARDIN . . . . . . . 7 8 9

92. LE BÂTI .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 4 3

57. LES LÉGUMES ASIATIQUES .. . . . . . . . . . . . . . . . 6 2 1

76. ACCUEILLIR LA BIODIVERSITÉ . . . . . . . . . 79 9

93. MICROFERMES,

55. LES MESCLUNS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 0 9

58. LES FLEURS COMESTIBLES .. . . . . . . . . . . . . . 6 2 7

90. VENDRE SA PRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . 9 2 9 91. L’ÉCONOMIE D’UNE MICROFERME .. . . 9 3 9

ÉCOSYSTÈMES DE MICROFERMES,

60. LES PLANTES MÉDICINALES . . . . . . . . . . . . 6 37

XIII. LES ANIMAUX ET LA TRACTION ANIMALE .. . . . 8 1 1

61. LES PLANTES SAUVAGES

77. LES ANIMAUX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1 3

DANS SA FERME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 5 5

COMESTIBLES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 41

78. LA TRACTION ANIMALE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 2 3

95. PRODUIRE DES CONNAISSANCES .. . . 9 6 3

59. LES PLANTES AROMATIQUES .. . . . . . . . . . . 6 3 1

62. LES CHAMPIGNONS .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 4 5

X. ARBRES, BUISSONS, FORÊTS-JARDINS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 5 3 63. VERS UNE CIVILISATION DE L’ARBRE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 5 5

XIV. LES FOINS ET LES CÉRÉALES

SYSTÈMES AGRAIRES SOLIDAIRES . . . . . . . . . 9 5 1 94. ORGANISER DES FORMATIONS

96. MODÉLISER UNE MICROFERME .. . . . . . . 9 67 97. CONSEILS AUX FUTURS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 37

MARAÎCHERS .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 8 1

79. LES FOINS .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 3 9

98. DÉVELOPPER L’ÉCOCULTURE

80. DU BLÉ SANS PÉTROLE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 4 5

EN TOUS LIEUX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 8 5 99. PRENDRE SOIN DU JARDINIER . . . . . . . . . 9 9 3

64. L’AGROFORESTERIE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 6 3

XV. LES OUTILS

65. LES HAIES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 6 9

81. LES OUTILS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 61

66. LES PRÉS-VERGERS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 675

82. L’ENTRETIEN ET L’AFFÛTAGE

67. LES VERGERS MARAÎCHERS . . . . . . . . . . . . . 679

DES OUTILS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 79

CONCLUSION

NOTES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 0 0 4

70. CONCEVOIR UNE FORÊT-JARDIN .. . . . . 70 1

XVI. CRÉER UNE MICROFERME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 8 7

71. ÊTRE SYLVANIER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 1 3

83. DEVENIR PAYSAN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 8 9

68. LES PETITS FRUITS .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 8 3 69. LES FORÊTS-JARDINS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 8 9

NOTES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 0 ANNEXES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 3

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84. EN QUÊTE D’UNE FERME . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 9 5 85. PAYSANS DES VILLES : AGRICULTURES URBAINES ET PÉRIURBAINES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 0 1

100. LE PLUS BEAU JARDIN DU MONDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 9 9 .................................. 1001

ANNEXES .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 0 07 BIBLIOGRAPHIE INDEX

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2 LES PRINCIPES FONDATEURS DE L’ÉCOCULTURE Le rapide survol de l’histoire de l’agriculture que nous venons d’effectuer donne de nombreuses indications sur les écueils à éviter et sur les solutions possibles. Imiter les écosystèmes spontanés semble être la solution par excellence. Voici quelques grands principes inspirés par la nature.

Ils fondent l’écoculture telle que nous la comprenons. Toutes les techniques décrites dans ce manuel s’en inspirent. Ce chapitre qui concentre notre expérience constitue l’essence de la méthode de la Ferme du Bec Hellouin.

1 IMITER LES ÉCOSYSTÈMES SPONTANÉS La permaculture propose de prendre la nature comme modèle, en particulier les écosystèmes spécifiques à chaque terroir. Nous allons chercher à renaturer, complexifier nos milieux cultivés, pour qu’ils deviennent des agroécosystèmes fonctionnant, autant que faire se peut, de manière largement autonome et pérenne. Voir “De l’écosystème à l’agroécosystème”, p. 103.

2 UTILISER L’ÉNERGIE DU SOLEIL Le monde vivant fonctionne grâce à l’énergie de notre étoile. Vu les dégâts engendrés par les énergies fossiles, nous chercherons comment remplacer ces dernières, chaque fois que possible, par la puissance du soleil. Voir “Le soleil, le vent, la pluie”, p. 75.

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3 BOUCLER LES CYCLES Nos agroécosystèmes fonctionneront en boucle, comme dans la nature. Dans l’idéal, nous veillerons à ne rien gaspiller, à n’engendrer aucun déchet. Tout est ressource ! Voir “De l’écosystème à l’agroécosystème”, p. 103, et “Une approche naturelle du sol et de la fertilité”, p. 213.

4 TIRER PROFIT DES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES L’application des principes précédents donnera des jardins et des fermes complexes, à l’instar des milieux naturels. La complexité de nos agroécosystèmes, la richesse des relations et des échanges entre leurs composants auront pour effet que de nombreuses fonctions s’opéreront spontanément, naturellement et gratuitement. Ces fonctions nous rendront des services qui permettront de diminuer la fréquence et l’intensité de nos interventions : création de fertilité, contrôle des ravageurs et des maladies, semis spontanés… Nous apprendrons à tirer profit des services rendus par la nature. Voir “De l’écosystème à l’agroécosystème”, p. 103.

5 DONNER AUX ARBRES UNE PLACE ESSENTIELLE Les arbres sont d’importants pivots de la vie sur Terre. Ils rendent d’innombrables services à la biosphère. Nous chercherons à développer des pratiques agricoles reposant largement sur les arbres. Ils seront les garants de la pérennité de nos agroécosystèmes. Voir les chapitres dédiés à l’agroforesterie, p. 653.

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CHAPITRE 2 LES PRINCIPES FONDATEURS DE L’ÉCOCULTURE | 37

6 CRÉER UNE SYNERGIE ENTRE LES ARBRES, LES VÉGÉTAUX CULTIVÉS ET LES ANIMAUX Nous avons pu constater que chaque fois que les paysans associaient ces éléments, en élaborant des systèmes agro-sylvo-pastoraux, ceux-ci gagnaient en productivité, en autofertilité et en durabilité. La permaculture propose divers outils conceptuels permettant de favoriser les interactions entre les éléments d’un système, outils que nous mettrons à profit pour élaborer des espaces cultivés bien plus performants que ceux du passé. Voir “Le design permaculturel”, p. 129, et “En quête d’une ferme”, p. 895.

7 PRÉFÉRER LES PLANTES VIVACES AUX PLANTES ANNUELLES Dans la nature, les plantes annuelles sont une exception : les plantes vivaces, ou pérennes, représentent plus de 99 % des végétaux sauvages. Nous chercherons donc comment redonner progressivement davantage de place aux cultures pérennes dans nos jardins. Voir “Les légumes vivaces”, p. 595.

8 FAVORISER LA BIODIVERSITÉ En créant différents milieux au sein du jardin et en y intégrant un point d’eau, des arbres…, nous favoriserons la diversité des espèces végétales et animales. Sauvage ou cultivée, la biodiversité remplit de nombreuses fonctions et procure un meilleur état sanitaire au jardin… Sans parler des joies qu’elle procure ! Voir “De l’écosystème à l’agroécosystème”, p. 103, et “Accueillir la biodiversité”, p. 799.

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9 ÉVITER LE TRAVAIL DU SOL Dans la nature, le sol n’est jamais travaillé de manière mécanique, et jamais à nu, sauf accident. Nous chercherons comment il est possible d’appliquer ce principe à nos cultures, pour éviter de détruire le précieux humus. Voir “Une approche naturelle du sol et de la fertilité”, p. 213.

10 CRÉER DU SOL Préserver soigneusement la terre arable est un premier pas, insuffisant au vu de l’érosion actuelle des ressources biologiques. Nous nous efforcerons de devenir cocréateurs d’humus, en comprenant, favorisant et amplifiant les processus naturels qui lui donnent naissance. Voir “Une approche naturelle du sol et de la fertilité”, p. 213.

11 S’APPUYER SUR L’INFINIMENT PETIT Certaines traditions paysannes, au Japon notamment, ont su favoriser la vie bactérienne des sols, sans même connaître l’existence des microbes. En agissant en faveur des populations de bonnes bactéries, par des moyens légers et des préparations autoproduites à la ferme, il nous sera possible d’avoir un effet levier et de favoriser la santé et la fertilité des sols. Voir “Une approche naturelle du sol et de la fertilité”, p. 213.

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CHAPITRE 2 LES PRINCIPES FONDATEURS DE L’ÉCOCULTURE | 39

12 ASSOCIER LES VÉGÉTAUX Les monocultures n’existent pas dans la nature ! Associer les végétaux cultivés favorise la santé et la productivité de nos jardins. Voir “Les associations de cultures”, p. 419.

13 ÉTAGER LES CULTURES Les plantes sauvages poussent rarement sur un seul plan : elles s’étagent, de manière à capter la quintessence de la lumière du soleil. Nous utiliserons de même la verticalité dans nos jardins. Voir “Les associations de cultures”, p. 419.

14 VALORISER LES PLANTES SAUVAGES Pourquoi ne pas tirer parti des plantes sauvages, qui croissent spontanément, pleinement adaptées au lieu, sans demander ni travail ni intrants ? Elles sont, le plus souvent, d’une grande valeur nutritionnelle et bénéfiques pour notre santé. Voir “Les plantes sauvages comestibles”, p. 641.

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15 UTILISER LES RESSOURCES BIOLOGIQUES Chaque fois que possible, nous choisirons d’utiliser des ressources biologiques simples et locales, plutôt que des solutions technologiques sophistiquées et énergivores, qui engendrent des dépendances. La meilleure technologie alternative est une alternative aux technologies ! Nos bâtiments, nos outils, nos clôtures seront de préférence réalisés avec des matériaux locaux et naturels. Voir “Le bâti”, p. 943.

16 MISER SUR LE MOYEN ET LE LONG TERME Contrairement à l’agriculture industrielle, productive à court terme mais s’appauvrissant dans la durée, nos agroécosystèmes mettront du temps à se déployer. Mais plus ils gagneront en maturité, plus ils seront autonomes, autofertiles, productifs et résilients. Voir “Les concepts du design permaculturel”, p. 137.

17 CULTIVER NOTRE JARDIN INTÉRIEUR Le respect des êtres humains va de pair avec le respect de la Terre. À l’instar des peuples premiers, nous percevrons l’unité et la communion de destin de tous les êtres vivants. En d’autres termes, nous cesserons de séparer l’humanité de la nature. En jardinant nos paysages intérieurs, nous embellirons le monde autour de nous. Il n’y a pas d’écologie véritable sans une écologie intérieure. Voir “Prendre soin du jardinier”, p. 993.

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30 LES BUTTES RONDES L’usage des buttes de cultures permanentes bio-intensives remonte à 4 000 ans en Chine, 2 000 ans en Grèce et 1 000 ans en Amérique latine. De fait, c’est ainsi que les Mayas cultivaient leur nourriture chez eux, dans leurs jardins familiaux. C’est l’une des raisons pour lesquelles leur culture a perduré tandis que d’autres autour d’eux s’effondraient 4. John Jeavons La butte permanente ronde nous vient des temps anciens, d’une époque où les paysans ne disposaient que de leurs mains et de quelques outils rudimentaires en bois. Réaliser et entretenir une butte est donc particulièrement simple. Pour les jardiniers amateurs comme pour les professionnels, pour les paysans du Nord et du Sud, la butte ronde permet de mener une production vivrière avec un investissement et des frais de fonctionnement réduits à l’extrême, hormis la main-d’œuvre. Cette forme d’agriculture n’engendre aucune dépendance aux énergies fossiles ni à des technologies et outillages sophistiqués, nul besoin en capitaux, en pièces détachées, pas de liens avec les multinationales de l’agrobusiness… Il s’agit d’un trésor offert par les peuples du Sud à l’humanité d’aujourd’hui, procurant aux paysans indépendance et sécurité alimentaire.

H Voici le potager familial lors des vacances de Pâques, le jour où nos enfants et leurs amis se livrent à la chasse aux œufs en chocolat traditionnelle ! Cette période est féerique. On ne s’habitue jamais au spectacle de la vie qui renaît et explose au printemps. Ce potager nourrit la famille et réjouit les cœurs. Son entretien nous demande environ deux à trois heures de travail par semaine.

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N’ayons pas peur des mots : si ce système de culture s’étendait à l’ensemble de la planète, avec les adaptations nécessaires à chaque contexte, il pourrait changer la face du monde, en permettant à chaque communauté d’assurer elle-même sa production vivrière. Il en résulterait une diminution de la malnutrition, de la violence et de la désespérance. Amis jardiniers, devenez des experts en culture sur buttes, enseignez-la à vos voisins et contribuez ainsi à laisser un monde meilleur à vos enfants !

DIMENSIONS D’UNE BUTTE RONDE Largeur : pour les raisons exposées au chapitre précédent, rappelons que la dimension optimale est comprise entre 80 centimètres et 140 centimètres de large. Façonnez des buttes qui correspondent à votre morphologie. Au Bec, nos buttes rondes font en moyenne 120 centimètres de large (quelques variantes seront présentées au chapitre 32, p. 343).

Longueur : nous vous recommandons de limiter la longueur des buttes pour les raisons suivantes : – Passer facilement d’un côté à l’autre ; – En faciliter la gestion ; – Éviter la monotonie. Une longueur de 5 à 10 mètres convient dans la majorité des cas. Nous apprécions d’avoir quelques buttes moins longues pour y cultiver des légumes occupant peu de place. Pour les légumes vivaces, il est judicieux de créer une butte par légume, et d’en ajuster la taille selon ses besoins : une butte d’épinards perpétuels, une butte de rhubarbe… Hauteur : au début, nous cherchions à réaliser des buttes hautes, qui sont visuellement plus spectaculaires. Toutefois, lors des semis, les graines ont tendance à rouler le long des pentes. Lors des arrosages, l’eau ruisselle davantage et les jeunes plants risquent d’être déchaussés ou ensevelis. Nous avons donc fait évoluer la forme de nos buttes qui se présentent maintenant comme des dômes aplatis. Le milieu de la butte est haut de 30 à 40 centimètres par rapport aux allées. Largeur des allées : elle doit être suffisante pour permettre une circulation facile, mais pas trop pour limiter leur entretien. Les allées demandent aussi des soins, sans engendrer de production. Nous vous conseillons des allées de 60 centimètres de large lors de leur création, sachant qu’ensuite leur taille diminuera lorsque les buttes s’affaisseront et que les feuillages des cultures en mangeront encore une partie. Au final, l’allée ne devrait pas faire moins de 35 centimètres. Quelques allées plus larges au centre du jardin sont appréciables pour le passage des brouettes, le transport des paillages et pour la circulation des groupes de visiteurs. Prenez

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en considération vos différents équipements (chariot de récolte, tondeuse…) pour déterminer la largeur de vos allées.

l’emplacement de tous types de jardins, ainsi que pour les forêts-jardins. SI VOUS ÊTES TRÈS PRESSÉ

Surface relative buttes/allées : plus les buttes sont petites, plus la surface relative des allées augmente. Il convient donc de rechercher le meilleur compromis en fonction de vos objectifs, de la morphologie des personnes qui travaillent au jardin, etc.

CRÉATION D’UNE BUTTE RONDE L’objectif est d’assurer les meilleures conditions de vie possibles à vos cultures. Nous vous conseillons de prendre le temps nécessaire à la réalisation d’excellentes buttes. Cette étape initiale demande un effort certain mais elle est réalisée une fois pour toutes. ÉTAPE 1 : DÉTRUIRE L’HERBE OU LA VÉGÉTATION EN PLACE

Il se peut que vous créiez vos buttes à l’emplacement d’un potager existant. Dans ce cas, le sol sera déjà travaillé et le travail facilité. Mais dans bien des cas, les buttes sont implantées à l’emplacement d’une pelouse, d’un herbage ou sur un terrain en friche. Il convient alors de détruire la végétation en place (petits cœurs sensibles, ne frémissez pas : vous ne mangez pas de l’herbe !). Venir à bout d’une végétation bien établie n’a rien d’évident. Si cette étape préalable est réussie, le travail d’entretien des buttes sera ensuite considérablement allégé. Plusieurs options s’offrent à vous. Les itinéraires proposés ci-après sont valables pour préparer

Travail mécanique : si cela vous est possible, nous conseillons de réaliser un travail mécanique avant de passer au travail manuel. Réalisez un passage de rotovator ou de motoculteur pour émietter le sol superficiel, le tissu racinaire et la végétation en place (nul besoin de vous équiper d’un engin mécanique, vous pouvez louer un motoculteur ou faire appel à un voisin agriculteur). Puis poursuivez le travail comme indiqué dans les lignes qui suivent. Travail manuel : bêchez et disposez les mottes de l’horizon superficiel, en les retournant (pour enfouir plus profond les parties aériennes), au centre de la butte. Puis effectuez un deuxième décaissage plus profond, à l’emplacement des allées, et recouvrez les mottes. Si elles sont ensevelies sous une vingtaine de centimètres de terre, il est probable que l’herbe ne repoussera pas. En se décomposant, elle apportera de la matière organique au cœur de la butte. SI VOUS N’ÊTES PAS PRESSÉ

Travail mécanique : une manière efficace de détruire une prairie est d’effectuer un labour, notamment dans les cas extrêmes de sol tassé ou envahi par une adventice particulièrement difficile. Certes, d’une manière générale nous évitons d’inverser les horizons du sol. Mais la création de buttes représente de toute façon une perturbation du sol en place, et dans ce cas un labour unique se justifie.

F Les gros ballots de paille ronds sont pratiques pour couvrir rapidement une surface de plusieurs dizaines de mètres carrés d’une bonne épaisseur de paillis. Si l’on veut vraiment éradiquer la végétation en place, le paillis doit être épais d’au moins 30 centimètres et renouvelé une ou deux fois si nécessaire.

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À l’issue du labour, les mottes sont retournées, racines à l’air. Idéalement, il doit être effectué en été pour que la chaleur et la sécheresse empêchent la reprise de l’herbe. Attendez ensuite deux à trois mois pour affiner le sol, à la herse, au vibroculteur (ou canadien) ou à l’aide d’un rotovator. Si vous interveniez plus tôt, vous remettriez à l’air une partie des feuilles et la végétation repartirait. À l’automne, donc, affinez le sol, créez vos buttes et couvrez-les d’un épais paillage pour l’hiver. Celuici empêchera les repousses d’adventices et créera, une fois décomposé, une litière d’humus, tandis que les vers de terre et les micro-organismes, mis à mal par l’opération de labour, vont pouvoir recoloniser les buttes et améliorer la structure du sol qui sera prêt à accueillir vos cultures au printemps suivant. Travail manuel : une manière plus douce de détruire l’herbe consiste à recouvrir l’emplacement à mettre en culture d’une ou de plusieurs bâches épaisses et opaques, des bâches tissées qui laissent passer l’air mais pas la lumière, par exemple. Bien évidemment, ces dernières doivent être solidement agrafées ou lestées pour ne pas s’envoler au premier coup de vent. Avant de poser la bâche, on peut déposer du compost en surface. Combien de temps ces bâches doivent-elles rester en place ? De trois mois à une année selon le résultat à obtenir, le plus long étant évidemment le mieux : en trois mois, vous aurez affaibli la végétation en place et disposerez de quelques semaines d’avance avant qu’elle ne reprenne. En un an, le couvre-sol préexistant se sera décomposé. Resteront en terre les graines et systèmes racinaires profonds. Si votre terrain est envahi de chiendent, une période supérieure à une année peut être nécessaire. La bâche en viendra à bout alors qu’un travail mécanique aura tendance à le multiplier. Certains terrains sont envahis de liseron, une plante bio-indicatrice de sols compactés et au C/N déséquilibré (trop d’azote). Pour en venir à bout, une stratégie efficace consiste à bien décompacter le sol, apporter des amendements équilibrés, installer des engrais verts avec des plantes qui vont ameublir le sol (crucifères et graminées) : le liseron se retrouvera ainsi dans des conditions défavorables à son développement. La bâche n’est pas franchement décorative dans un jardin, mais cette approche est la plus respectueuse pour le sol et la moins intensive en travail. Sous la bâche, la végétation va progressivement se décomposer, tandis que les vers de terre ameubli-

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ront le sol. Il sera ensuite facile de le mettre en culture. Cette solution est, à notre sens, la meilleure. Elle n’est toutefois applicable que pour des jardins de petite taille, mais un professionnel peut l’adopter en préparant chaque année une nouvelle parcelle, de manière à monter en puissance progressivement, ce qui est vivement conseillé. SI VOUS N’ÊTES VRAIMENT PAS PRESSÉ

Si vous disposez de une à deux années supplémentaires avant de démarrer votre jardin, il est pertinent d’implanter des engrais verts. Ceux-ci ameubliront le sol et l’enrichiront, tout en affaiblissant la flore spontanée avant la mise en culture. Pour détruire la culture d’engrais verts, procédez selon les scénarios proposés précédemment (vous trouverez plus d’informations sur les engrais verts au chapitre 24, p. 253). ÉTAPE 2 : PRÉPARER LE SOL

L’emplacement de la future butte doit être décompacté au préalable (ce décompactage aura déjà été réalisé si vous avez détruit une prairie mécaniquement selon les indications données dans les paragraphes qui précèdent). La butte bénéficiera ainsi d’un sol ameubli sur une plus grande profondeur. Votre décompactage doit s’étendre à toute la surface concernée par la future butte et les allées qui l’entoureront. Ainsi, le pelletage sera facilité.

Avant de créer un jardin ou une forêt-jardin, il convient d’éradiquer soigneusement la végétation en place afin de limiter l’enherbement ultérieur. N’ayez surtout pas recours aux poisons chimiques, les paillis organiques les remplaceront avantageusement et ils fertiliseront votre sol.

Le décompactage se fait à la grelinette ou, mieux, à l’aide d’une Campagnole. Si le terrain est fort compacté, choisissez la Campagnole de 50 centimètres de large. C’est la meilleure solution. Le travail peut également être effectué au motoculteur mais les fraises ne descendront guère qu’à une dizaine de centimètres, ce qui est insuffisant. À l’emplacement des futures allées, vous pourrez toutefois effectuer un premier passage au motoculteur, pelleter la terre pour commencer à former la butte, puis effectuer un second passage et pelleter à nouveau. Deux passages suffisent à créer une butte d’un bon volume. Nous déconseillons d’attaquer directement le sol à la bêche : le travail sera plus pénible et vous devrez de surcroît briser les mottes. ÉTAPE 3 : FORMER LA BUTTE

Une fois le sol décompacté et affiné, il faut délimiter l’emplacement de la future butte par des tuteurs ou des cordeaux. Nous conseillons des tuteurs car les cordeaux sont vite enfouis et gênent les mouvements de pelle. Il vous suffit ensuite de pelleter la terre des allées et de la mettre à l’emplacement de la butte. En décaissant les allées d’une vingtaine de centimètres, vous obtenez une butte respectable. Si l’allée est

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F Voici la technique que nous utilisons pour former une butte ronde. Le sol est préalablement décompacté sur toute la largeur qu’occuperont la butte et les allées qui l’entourent. Puis la terre arable est prélevée à l’emplacement des futures allées et déposée pour former la butte. Il faut généralement réaliser un premier passage, décompacter à nouveau, puis creuser une seconde fois. Les allées sont décaissées sur une profondeur de 15 à 20 centimètres. Des piquets sont disposés de place en place afin de délimiter la butte.

H Nous donnons ensuite à la butte une forme de pyramide, ce qui nécessite un ratissage prolongé qui affine la terre. La forme en V inversé permet d’obtenir une butte d’une grande régularité. Les creux et les bosses sont nivelés.

F Le sommet de la pyramide est ensuite progressivement arasé, ce qui fait couler de la terre très fine sur toute la surface de la butte. Pour ce faire, on marche autour en donnant des coups de râteau légers dans le sens de la longueur, jusqu’à atteindre une courbe parfaite. On obtient alors une très jolie butte formée d’une grande épaisseur de terre meuble et fertile.

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encadrée par deux buttes, répartissez la terre entre chaque butte de manière qu’elles soient de taille égale. Travaillez dans le premier horizon du sol, celui qui est riche en matière organique. Le substrat récupéré devrait être constitué d’une bonne terre arable. Dans le cas où votre sol serait très peu profond, comme dans notre ferme, arrêtez-vous à la limite entre l’humus et l’horizon inférieur – facilement reconnaissable à sa couleur plus claire –, ne descendez pas plus bas. Inutile de mélanger les horizons. Si votre sol est caillouteux, n’hésitez pas à sortir ces derniers au fur et à mesure. C’est fastidieux mais votre butte sera ensuite plus apte à accueillir les cultures de carottes et autres légumesracines. Pensez que ces cailloux sont une ressource, disposez-les aux emplacements qui ont besoin d’être remblayés (ornières…), ou réalisez de petits monticules autour des points d’eau ou au pied des haies pour créer des refuges pour les auxiliaires du jardin. Ces cailloux peuvent encore jouer un rôle de capteur de lumière et de chaleur, et être disposés autour des plantes qui en auraient besoin. Au Bec, nous avons mis au point une méthode simple pour obtenir des buttes de belle allure. Une fois formé le tas de terre qui deviendra la butte, nous l’affinons encore si besoin à l’aide d’un croc ou du tranchant de la pelle (le croc est un outil très utile pour ce type de travaux, bien que trop peu connu des jardiniers amateurs). Ensuite, nous remontons les côtés du tas pour lui donner une forme en V inversé, en pyramide. Pour réaliser ce travail, tournez autour de la butte plusieurs fois jusqu’à obtenir une ligne de crête qui doit être positionnée au centre de la butte et filer bien droit. À ce stade, on peut facilement observer les éventuelles irrégularités. Il se peut que la butte soit large à un endroit et maigre plus loin. Dans ce cas, prélevez la terre en excédent et venez combler les manques. Vérifiez également la ligne de crête qui doit être régulière. Ensuite, vous allez donner à la butte sa forme définitive de dôme aplati. Pour cela, à l’aide d’un râteau, tournez autour de la butte en ratissant gentiment et progressivement la ligne de crête pour faire couler sur les flancs de la butte une terre légère et fine qui formera le lit de semences. Passez le râteau dans le sens de la longueur, sans trop appuyer, cela vous permettra de lisser les irrégularités. Si vous le passez dans le sens de la hauteur, vous allez créer des creux et des bosses, un effet de “tôle ondulée”. Soignez les finitions. Une butte est comme une sculpture, donnez-lui une forme parfaite. Sa

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courbure doit filer souplement, sans cassure. Il serait dommage d’opter pour des buttes toutes droites, alors qu’il est si facile de leur donner des formes courbes qui formeront un jardin beau comme un tableau. Cette étape est gratifiante, après les efforts du début. On a le sentiment de masser le corps de la Terre-Mère, ses rondeurs, ses courbes sensuelles. ÉTAPE 4 : APPORTER DU COMPOST

Cette étape est présentée séparément pour des raisons de clarté. Dans la pratique, les apports de compost se font au fur et à mesure de la construction de la butte. N’hésitez surtout pas, comme évoqué au chapitre précédent, à faire un apport de compost important si votre sol en a besoin. C’est le moment ou jamais. À ce stade, vous pourrez facilement l’incorporer sur toute la hauteur de la butte.

Créer des buttes rondes et courbes s’apparente à une forme de land art. Le jardin ainsi formé est une œuvre d’art où l’on a toujours plaisir à travailler.

Le plus simple est d’étaler une généreuse couche de compost bien mûr à la surface du sol au début des opérations, avant même le décompactage. Ainsi, chaque étape du travail contribuera à l’incorporer, y compris en profondeur. Si votre sol a d’autres besoins, profitez-en pour apporter les amendements nécessaires : marne, argile… ÉTAPE 5 : SOIGNER LES ALLÉES

Trop souvent, nous observons que les jardiniers ont tendance à fignoler les buttes mais à négliger les allées. Or, ces dernières font partie intégrante du “système buttes” et elles méritent également vos soins. Ayez le goût de la “belle ouvrage”, comme disaient les anciens. Les soins apportés à chaque étape sont autant de temps gagné par la suite. Vous observerez qu’il est facile, par exemple, de désherber parfaitement une allée lors de la création de la butte ou lors de son gros entretien, mais plus difficile et plus fastidieux de le faire une fois les cultures implantées. Or, c’est souvent par les allées que les buttes s’enherbent, notamment au niveau de la jonction entre le bas de la butte et le bord de l’allée. Après le décaissage, le fond des allées est souvent irrégulier. Vous pouvez le lisser par un passage de motoculteur ou de Campagnole, ou par un bon coup de croc. Ensuite, si vous optez pour pailler les allées, il est temps de les recouvrir, après avoir achevé la butte et avant d’implanter les cultures.

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GESTION DES ALLÉES LES ALLÉES PAILLÉES

Dans la nature, chaque élément remplit plusieurs fonctions. Nos allées sont des voies de circulation mais, au Bec Hellouin, elles sont également un lieu de production de fertilité car nous avons choisi de les pailler. Le désherbage des allées est ainsi quasiment supprimé. Pailler une allée est pour nous une charge de travail moindre que de les désherber. Pailler une allée nécessite, environ 3 fois par an, un apport de matière organique d’une épaisseur de 5 à 10 centimètres. Ceci représente des volumes assez considérables, des dizaines de mètres cubes pour un jardin d’une certaine taille, qui vont se composter en place à l’emplacement des allées. Ces apports renouvelés d’année en année vont progressivement faire monter le niveau du sol. Nous constatons qu’il se forme une épaisseur d’environ 4 centimètres de compost par an dans nos allées. Elles contribuent ainsi à la dynamique de fertilité du jardin. Le compost créé dans les allées profite aux cultures du fait que les racines s’étalent et viennent y puiser des nutriments. Il est également possible de décaisser les allées tous les deux à trois ans pour recharger les buttes. Leur volume augmente donc. La matière organique utilisée pour pailler les allées sera de préférence une matière disponible en grande quantité, donc plutôt à dominante carbonée : fumier, bois broyé, feuilles mortes, fougères… Le fait de mettre de la matière carbonée dans les allées permet d’éviter la “faim d’azote” qui pourrait survenir si elle était déposée sur les buttes. Cette matière carbonée est prédigérée dans les allées, avant d’être éventuellement ratissée pour

revenir sur les buttes lorsque celles-ci auront besoin d’être paillées. Les allées se comportent donc en quelque sorte comme les “intestins” du jardin, qui digèrent les nutriments avant de les restituer aux buttes. Nous avons toutefois été confrontés à une question : est-ce que le compostage des paillages dans les allées s’effectue dans de bonnes conditions ? Le piétinement répété tasse en effet les mulchs et il y a un risque d’anaérobiose (absence d’oxygène) qui nuit au processus de compostage et favorise une putréfaction. D’après nos recherches, ceci dépend des allées. Si le jardin n’est pas ouvert au public, les allées ne sont pas fréquemment empruntées et le paillage permet d’éviter le tassement. Les allées les plus empruntées gagneront à être paillées avec des éléments grossiers (bois broyé). Le bon sens veut que l’on évite de recharger les buttes avec le substrat d’une allée s’il présente un aspect peu engageant. Il suffit d’observer la structure et de sentir le substrat pour juger si l’on a affaire à un compost décent ou pas. La présence de vers, une structure grumeleuse et une odeur d’humus, de sous-bois sont des signes rassurants. Une étude sur les vers de terre dans notre ferme a mis en évidence que les populations de vers sont paradoxalement plus abondantes dans nos allées que dans la prairie témoin. Ces vers se nourrissent des mulchs et contribuent à une bonne décomposition. LES ALLÉES VÉGÉTALISÉES

Une allée très fréquentée peut être couverte d’un engrais vert ras, comme du trèfle nain ou souterrain, pour éviter ce phénomène de compaction et

F Lorsque les buttes ont été reformées à la sortie de l’hiver, une couche de compost peut être déposée à leur surface, comme ici sur ces buttes du jardin mandala. La couleur sombre du compost favorise leur réchauffement.

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d’anaérobiose. Du reste, l’ensemble des allées peut être végétalisé. Un engrais vert tondu ou fauché pourra procurer un mulch intéressant, surtout s’il est constitué de légumineuses. Au Bec Hellouin, après essais, nous avons choisi de pailler les petites allées entre les buttes car, lorsqu’elles sont végétalisées, l’enherbement gagne rapidement les buttes et c’est une lutte permanente pour les désherber. Mais nous laissons enherbées les grandes allées entre les jardins car les volumes de paillages pour les recouvrir seraient énormes. Nous n’avons pas réussi à y implanter des engrais verts de type trèfle : la flore spontanée reprend le dessus en quelques mois – l’herbe normande est particulièrement vigoureuse ! Ces allées sont tondues régulièrement, avant que l’herbe ne monte en graine, et ces tontes, riches en azote, peuvent être utilisées en paillage. Si les tontes sont suspectes (si certaines herbes sont montées en graine), nous les déposons sur des buttes dédiées que nous recouvrons de temps en temps d’un mulch épais pour éviter toute reprise. LES ALLÉES DE TERRE NUE

Il est également possible, sous serre notamment, d’opter pour des allées nues que l’on désherbe régulièrement. Durant nos premières années, notre ferme en comportait un certain nombre. Mais nous avons abandonné ce système, hérité des jardins classiques, dès que nous avons pu car la charge de travail pour les garder propres est trop grande. C’est de plus un non-sens agronomique, engendrant tassement, lessivage, lixiviation, perte de biodiversité…

ENTRETIEN DES BUTTES RONDES LE CAS DES BUTTES TOUJOURS RECOUVERTES D’UN PAILLAGE

Il est possible de gérer les buttes de manière minimaliste en les gardant toujours couvertes d’un mulch épais. Celui-ci doit être renouvelé deux ou trois fois par an. Cette approche demande très peu de travail mais le potentiel de productivité est limité par plusieurs facteurs : – Au printemps, la butte sera plus lente à se réchauffer. – Il ne sera pas possible de pratiquer les semis de petites graines à travers un mulch épais. Il faudrait pour ce faire écarter le paillage. – Un mulch épais nuit au repiquage dense des légumes de petite taille. Les buttes toujours couvertes sont un bon système pour un jardinier amateur souvent absent ou ne désirant pas trop s’investir. Elles ont également leur place chez un jardinier-maraîcher pour certaines cultures comme les courges, en complément de buttes gérées de manière plus intensive.

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LES BUTTES RONDES CULTIVÉES INTENSÉMENT

Les buttes nécessitent un entretien dès lors que nous désirons maintenir leur potentiel de productivité à un niveau élevé. Un sol cultivé, même si l’on ne marche jamais dessus, est sujet à un tassement qui dépend de la nature du terrain et de sa teneur en matière organique : – Un sol à dominante d’argile ou de limon se compactera davantage qu’un sol sableux. – Un sol riche en humus se compactera moins qu’un sol pauvre en matière organique.

E Au printemps, lorsque le sol est bien réchauffé, nous paillons les allées et les buttes. Ceci estompe un peu leur effet visuel, mais protège le sol et limite l’évaporation et l’enherbement.

De plus, comme évoqué, la butte a tendance à s’affaisser. Si l’on ne fait rien, en deux ou trois ans il n’en restera qu’un simple monticule. ÉTAPE 1 : GESTION ET RYTHME DES PAILLAGES

Comme évoqué au chapitre sur les paillis (chapitre 22, p. 229), idéalement, une butte devrait rester toujours couverte. Toutefois, pour un jardinier-maraîcher désirant mener des cultures intensives, cette règle demande quelques aménagements. C’est du moins ce que nous faisons au Bec Hellouin, libre à vous de faire d’autres choix ! En fin d’hiver et au début du printemps, nous enlevons les paillages au fur et à mesure des besoins, deux à trois semaines avant la mise en culture. Les mulchs sont simplement ratissés et déposés dans les allées où ils achèveront de se composter. Ceci présente plusieurs avantages : – L’absence de paillage permet de décompacter, d’amender au besoin et de reformer la butte, une opération qui sera décrite dans l’étape 2. – Débarrassée de la couverture isotherme que représente le mulch, la terre se réchauffe et se ressuie plus vite. Elle atteint une température suffisante au réveil des micro-organismes du sol qui, à ce stade, ne craignent pas les uv, peu agressifs.

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de la butte, nous avons apporté du compost bien mûr sur toute la profondeur du profil. Mais lors des apports de compost entre deux cultures, à la dose d’entretien, nous ne cherchons pas à l’incorporer, il est simplement déposé en surface. Nous reproduisons ainsi ce qui se passe dans la nature : l’horizon du sol le plus fertile est la litière en surface. Les vers vont se charger d’incorporer ce compost au sol. L’absence de paillage et l’apport de compost en surface nous permettent de disposer en tout début de saison d’une belle terre meuble et bien noire, du fait de sa teneur en matière organique. Ce facteur favorise également le réchauffement puisque les rayons du soleil sont mieux absorbés par une couleur sombre.

E Voici deux buttes, l’une a été paillée, l’autre pas encore car les plants qu’elle porte sont trop petits : mieux vaut attendre deux à trois semaines qu’ils grandissent afin de ne pas les abîmer en installant le paillis.

– La terre à nu permet d’effectuer un faux semis et de vider en partie le stock de graines d’adventices. – C’est au printemps que les limaces sont les plus actives et que nos végétaux sont les plus tendres et appétants. Le paillage les favorise. Son absence à cette période de l’année permet de diminuer la pression des limaces. On met aussi à nu les œufs de limaces, qui vont sécher ou être mangés par les auxiliaires. C’est le moment d’apporter du compost et/ou des amendements si nécessaires. Lors de la création

Bien évidemment, la terre à nu sera soumise à la compaction et au lessivage, il ne faudra pas tarder à implanter les cultures. Un nouveau paillage sera déposé vers les mois de mai ou de juin, ou quand les conditions météorologiques entraîneront un assèchement du sol, pour le protéger avant les grosses chaleurs estivales. Durant les deux mois environ pendant lesquels le sol aura été à nu, nous aurons effectué si nécessaire un, deux ou trois passages de sarclage superficiel afin de détruire les premières levées d’adventices et de casser une éventuelle croûte de battance. Le nouveau paillage sera donc déposé sur une terre meuble, propre et bien humide.

F Les jardins situés au-dessus de l’abbaye sont difficiles d’accès du fait de leur forte pente. Nous les paillons et fertilisons exclusivement avec les ressources prélevées sur place : orties, feuilles mortes et fougères.

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CYCLE ANNUEL DU PAILLAGE POUR DES BUTTES CULTIVÉES INTENSÉMENT

Faire un dessin représentant le cycle annuel, Charles, moyen

AUTOMNE-HIVER ÉPAIS PAILLIS À DOMINANCE CARBONÉE

FIN D’HIVER-DÉBUT DU PRINTEMPS LA TERRE EST MISE À NU POUR QU’ELLE SE RÉCHAUFFE PLUS VITE

La butte restera ensuite toujours couverte, par les mulchs et/ou les canopées de feuilles de légumes, jusqu’à la fin de l’hiver suivant. Seule exception : un semis de petites graines (radis, carottes, navets…) qui nécessitera à nouveau d’enlever le paillage. À l’automne et en hiver, le sol doit impérativement être bien couvert pour le protéger des fortes pluies. Une excellente gestion des paillages diminue considérablement la charge de travail et favorise la santé du sol et des cultures. ÉTAPE 2 : DÉCOMPACTER LA BUTTE

Si la butte est fort compactée ou affaissée, il est nécessaire de lui redonner sa forme initiale de dôme aplati. Cette intervention se fait de préférence en tout début d’année, de manière à favoriser l’oxygénation du sol, son ressuyage, et ainsi activer le réveil de la vie microbienne qui va conduire à la minéralisation de la matière organique et mettre les nutriments à disposition des végétaux. Pour procéder à un décompactage en profondeur, nous utilisons une grelinette. Nous travaillons perpendiculairement à l’axe de la butte, en décompactant d’abord un côté, puis l’autre. Il est plus facile de partir du sommet de la butte, puis de descendre vers le bas. Le dernier coup de grelinette doit permettre de travailler le bord de l’allée, qui est l’endroit où se concentrent généralement les adventices.

FIN DU PRINTEMPS-ÉTÉ PAILLIS À DOMINANCE AZOTÉE

simplement jetées, la motte à l’air, sur le paillage d’une butte voisine. Elles se composteront en place. Nous avons fait fabriquer une grelinette aux dents longues de 40 centimètres pour aérer en profondeur, mais son usage n’est pas très pratique. Une fois effectué le passage à la grelinette, ratissez bien pour briser les mottes, amendez au besoin, affinez la terre puis redonnez forme à la butte. Cette opération est conduite comme indiqué à l’étape 3 du paragraphe “Création d’une butte ronde” (p. 329). Si la butte est régulièrement entretenue et paillée, ce gros travail de décompactage est inutile. Un simple coup de croc suffit pour remonter la butte, suivi d’un ratissage. Le décompactage n’est réalisé généralement qu’une fois par an. Entre les cycles de cultures suivants, un coup de râteau devrait suffire à redonner forme à la butte. Il est parfois nécessaire de passer un coup de binette superficiel. Le désherbage sera abordé en détail au chapitre 42, p. 413.

UNE VIEILLE MÉTHODE ANGLAISE Comme évoqué au chapitre 22, John Seymour, un fermier et écrivain anglais qui nous a beaucoup inspirés, décrit une méthode qu’il a pu observer dans certains potagers entre les deux guerres mondiales. Les jardiniers n’effectuaient aucun travail du sol et se contentaient d’apporter, une fois par an, un lit de compost de 5 centimètres d’épaisseur. Cette couche épaisse protégeait le sol de la compaction, supprimait le désherbage et permettait d’assurer des récoltes exceptionnelles.

Lorsque les buttes sont régulièrement désherbées, elles demandent de moins en moins d’interventions car le stock de graines d’adventices s’épuise. Les paillis renouvelés permettent à la terre de conserver une belle structure meuble. On obtient alors des buttes d’une très haute productivité et d’un entretien facile.

Cette approche, prisée de nos jours de certains maraîchers d’Amérique du Nord, nous paraît très pertinente dans le cadre des buttes permanentes. Il faut toutefois disposer de quantités de compost importantes. Elle sera facile à mettre en œuvre pour un jardinier amateur. Au fur et à mesure, enlevez les cailloux et les adventices avec leurs racines. Ces dernières sont

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Après nous être intéressés aux buttes rondes, nous allons maintenant aborder les planches plates, une forme plus moderne de buttes permanentes.

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888 | PARTIE XII SANTÉ DU JARDIN ET BIODIVERSITÉ

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H Les agriculteurs qui nous entourent ont parfois du mal à comprendre notre démarche, mais nous en rencontrons de plus en plus dont la confiance dans le “progrès” se lézarde, qui avouent ne pas vouloir manger leur production. Les néo-ruraux qui viennent à la terre peuvent contribuer à faire bouger les lignes du monde agricole, si leurs fermes sont convaincantes. On peut être vigilant sur l’équilibre économique de sa ferme tout en intégrant pleinement des critères environnementaux, esthétiques, et même poétiques et spirituels.

83 DEVENIR PAYSAN L’Histoire démontre surabondamment que seuls les peuples qui ont su vivre en heureuse harmonie avec leur sol sont restés prospères et pacifiques1. Philippe Desbrosses Les chapitres à venir s’adressent aux personnes désirant devenir paysans. Les jardiniers amateurs pourront être intéressés par certains aspects.

FAIRE DE LA TERRE SON MÉTIER Être paysan n’est pas un métier comme les autres. Embrasser cette profession transforme de nombreux aspects de notre vie. Les contraintes sont fortes, y compris pour l’entourage, la rémunération le plus souvent basse, surtout si on la rapporte au nombre d’heures travaillées, qu’il vaut mieux ne pas compter ! Ce qui nous pousse à faire le choix exigeant de la terre n’est donc pas l’attrait d’un gros salaire, ni d’un statut social élevé, ni encore de pouvoir s’offrir beaucoup de loisirs… On renonce à tout cela. G Les aléas climatiques et les ravageurs nous invitent souvent à la modestie, mais nous cherchons à faire mieux à chaque saison et la quête de la qualité ultime est un puissant moteur.

Qu’est-ce qui fait donc que le désir de changer de vie puisse devenir irrésistible au point de choisir un métier aussi contraignant ? Probablement le fait que l’on n’a qu’une vie, qu’elle passe vite et que l’on aspire à ce qu’elle soit pleine et reliée, qu’elle ait du sens. Être paysan, c’est prendre soin de la

vie, c’est contribuer au bien-être de sa communauté, c’est exercer une influence, même minuscule, sur à peu près tous les sujets majeurs : la santé, l’emploi, les paysages, la préservation de la biosphère, le climat, la faim dans le monde… On sait pourquoi on se lève le matin ! Devenir paysan est donc un choix de vie. Une décision que l’on ne prend pas à la légère.

LES NIMA (“NON ISSUS DU MONDE AGRICOLE”) Il est probable que vous êtes, comme nous, un nima (il faudra vous y faire : le milieu agricole adore les sigles !). Votre installation sera qualifiée de “hors cadre familial”. Être étranger au monde agricole représente un handicap supplémentaire par rapport à la personne qui reprend une ferme familiale. Vous avez tout à apprendre et serez parfois regardé d’un œil circonspect – depuis la vague de retour à la terre des années 1970, les ruraux en ont vu défiler, des idéalistes qui ne tiennent pas la distance ! Mais faire le choix de la terre par passion présente aussi quelques avantages : vous bénéficiez d’un œil neuf, non formaté, et aucun entourage familial ne vous reprochera de faire évoluer les pratiques. Nous avons souvent entendu des agriculteurs se confier sur les difficultés de transformer une ferme sur laquelle vivent encore parfois les générations précédentes. NE SOYEZ PAS TROP NAÏF Être agriculteur est plus qu’un métier… mais c’est quand même un métier ! L’un des plus difficiles qui soient. Quitte à mettre les pieds dans le plat, allons-y jusqu’au bout : les agriculteurs exercent la profession qui connaît le plus fort taux de suicides (en France)2. En 2016, un agriculteur s’est suicidé tous les deux jours3. Solitude, rémunération qui ne permet pas de vivre décemment, épuisement… Il est facile de rêver devant des images bucoliques de la campagne en été, de fantasmer le retour à la

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F Les livres et les vidéos portant sur le jardinage sont de plus en plus nombreux. Ils sont des alliés précieux, toutefois ils ne constituent pas en eux-mêmes une formation complète. Nous ne saurions trop conseiller de réaliser des stages de longue durée chez des maraîchers professionnels.

Pour avoir exercé bien d’autres métiers, nous avons été stupéfiés par la charge administrative qui est aujourd’hui imposée aux agriculteurs.

terre, mais mieux vaut envisager tous les aspects de ce choix de vie, y compris sa part d’ombre, avant de s’y lancer. Au Bec Hellouin, nous avons touché le fond bien des fois. Cette aventure aurait pu nous mener au divorce. À défaut, elle nous a conduits tous les deux à l’hôpital pour des pathologies liées au stress et au burn-out. Cela a été aussi difficile pour deux raisons principales : notre absence de formation initiale et le manque de repères en ce qui concerne l’écoculture. Nous espérons que ce manuel permettra de pallier un peu ces obstacles. Lorsque des candidats à l’aventure nous demandent conseil, nous leur répondons sans l’ombre d’une hésitation : Prenez le temps de bien vous former ! Si cela peut vous rassurer : nous sommes mille fois plus passionnés aujourd’hui par notre métier que

nous ne l’étions en l’abordant et ne regrettons pas de nous être lancés dans cette aventure, malgré ses difficultés. Mais si c’était à refaire, au lieu de foncer en avant nous avancerions pas à pas, en prenant le temps de bien préparer chaque nouvelle étape et en profitant de la vie à chaque instant.

SE FORMER Connaissez-vous une seule profession qui s’apprenne en quelques mois ? La plupart demandent des années d’apprentissage. Notre ami Jean-Martin Fortier, le célèbre jardinier-maraîcher québécois, affirme : “Il faut 20 000 heures pour faire un maraîcher.” Cela fait quatre à cinq années de travail assidu. Nous confirmons ! Ces dernières années, nous avons vu plusieurs “personnes des villes” changer de vie, se rapprocher de la terre puis s’autoproclamer “expertes en maraîchage” et réaliser des activités de conseil,

Le point de vue de Perrine J’ai eu l’occasion d’accompagner de nombreux projets d’installation agricole, en tant que conseillère régionale en charge de l’agriculture biologique pour la Haute-Normandie, puis dans le cadre des activités de notre ferme. J’ai pu constater à quel point le monde agricole est complexe. Il a ses codes, ses usages, ses règles et ses lois ! Celles-ci ont été créées pour protéger ce statut et éviter une trop grande porosité du milieu à des projets ou des personnes peu sérieuses, afin notamment de limiter la perte des terres agricoles. Mais créer une ferme, d’un point de vue administratif et juridique, est bien plus complexe que de créer une entreprise lambda. Ceux qui ont une expérience de chef d’entreprise sous-estimeront peut-être la difficulté du parcours à effectuer. Gare à cela ! Même pour les personnes issues du monde agricole, le parcours à l’installation est un casse-tête. Il faut donc se familiariser avec les codes, usages et règles, et surtout savoir que le parcours de création est souvent long (autour de dix-huit mois à deux ans) ; il faut donc s’armer de patience. Souvent, les nima portent ce projet avec beaucoup d’émotion et la moindre contrariété ou difficulté les amène dans un jeu de montagnes russes émotionnelles. Il faut accepter que tout le monde ne sera pas immédiatement et complètement enthousiasmé par votre projet, certains même ne le comprendront pas et pourront avoir des mots durs. Ne vous laissez pas déstabiliser, ne vous fâchez pas non plus, c’est inutile. Dites-vous que vos interlocuteurs n’en sont peut-être pas encore à votre niveau de compréhension des enjeux de notre planète, donc ayez de la compassion pour eux, expliquez et réexpliquez. À chaque difficulté de notre parcours (y compris une fois installés), lorsque nous avons pu échanger, expliquer, nous avons réalisé combien les portes s’ouvrent (certes, parfois lentement) quand on parvient à mettre en place un dialogue respectueux.

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alors même qu’elles n’avaient jamais eu le statut d’agriculteur. Cela dénote un certain mépris pour cette profession, comme s’il n’y avait pas besoin de l’apprendre… Mieux vaut faire preuve d’humilité et se mettre pendant le temps nécessaire à l’école des champs et de ceux qui en vivent. Certes, on vient à la terre riche de sa vie antérieure, même si son précédent métier n’avait rien à voir. Les compétences et la maturité acquises précédemment seront certainement précieuses d’une manière ou d’une autre. Mais elles ne dispensent pas de se former. Il y a un paradoxe : l’enseignement agricole ne prépare pas encore aux nouvelles formes d’agriculture qui font l’objet de ce manuel. Les enseignants ne les connaissent pas vraiment, même si en France il y a un raz de marée en faveur des microfermes et de la permaculture, qui fait évoluer l’enseignement agricole. À l’heure où j’écris ces lignes, fin 2017, les institutions en charge de l’agriculture nous disent que 80 %des projets d’installation en maraîchage bio aspirent à se faire sur un modèle de microferme permaculturelle4 ! Mais, en attendant que l’enseignement de la permaculture et de l’écoculture se soit généralisé au sein du monde agricole, il faut construire soi-même son parcours. Nous suggérons de suivre plusieurs formations complémentaires, dans des contextes différents.

CRÉER SON PROPRE PARCOURS DE PROFESSIONNALISATION Voici un parcours de formation complet, si vous n’avez aucun bagage agricole. 1. Testez-vous en réalisant des stages pratiques chez des agriculteurs. Pas juste un seul essai, ni une semaine à la belle saison ! Ces stages seront l’opportunité de vous confronter à la réalité du quotidien d’une ferme.

4. Suivez une formation en écoculture, comme celles que nous proposons au Bec Hellouin. Il s’agit de formations professionnelles destinées aux agriculteurs, dans lesquelles nous enseignons la dimension permaculturelle et les techniques de micro-agriculture développées à la ferme. Ces formations sont rarissimes à ce jour, mais elles peuvent être remplacées par ce manuel qui contient beaucoup plus d’informations que nous ne pouvons en donner en quelques semaines de cours. 5. Réalisez des stages pratiques de longue durée, plusieurs mois, idéalement une année complète, au sein de fermes qui se rapprochent de vos aspirations. Certaines personnes répugnent à travailler bénévolement au sein d’une ferme. C’est, nous semblet-il, un bien mauvais calcul. Dites-vous que le temps que le paysan consacre à vous former vaut largement le travail que vous réalisez pour lui en retour. Mieux vaut faire ses erreurs chez les autres que chez soi. Le temps que vous dédiez à votre formation vous permettra d’économiser beaucoup de dépenses inutiles ultérieurement et vous rendra plus vite productif. Le modèle que promeut notre ferme demande peu d’investissements matériels, en tout cas moins que les autres formes d’installation agricole, mais il nécessite beaucoup plus de connaissances et de compétences. C’est en vous-même qu’il faut investir ! Se former demande du temps et de l’argent, il n’y a pas de miracle, c’est incontournable.

LES INSTITUTIONS DU MONDE AGRICOLE Si vous n’êtes pas né dans une ferme, votre temps de formation vous permettra, je vous le souhaite, d’apprendre à naviguer dans la galaxie des institutions

E Explorer de nouvelles manières de produire notre alimentation est une passionnante aventure cognitive. Nous apprécions de puiser à des sources diverses, un jour plongés dans la lecture des témoignages de l’agriculture préindustrielle, un autre dans celle des plus récentes publications scientifiques.

G Nous apprécions aussi la diversité des rencontres qu’autorise paradoxalement le statut de néo-paysan. Sur cette photo sont réunis l’équipe permanente de la ferme, notre famille et des stagiaires, agriculteurs en formation et étudiants venus de Science-po ou d’écoles d’agronomie pour réaliser au Bec Hellouin leur mémoire de fin d’études.

2. Suivez une formation en agriculture bio classique, en choisissant une formule qui se rapproche d’aussi près que possible de votre projet. Il est possible de suivre certaines formations en continu ou par correspondance, comme le brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole (bp rea). Un bp rea en maraîchage bio donne de bonnes bases durant une année d’études, au sein de laquelle on réalise plusieurs semaines de stages pratiques. De plus, il fait partie des formations diplômantes qui vous donnent accès aux aides à l’installation (si vous répondez aux critères d’âge). 3. Suivez des formations en permaculture, de type “Cours de conception en permaculture” (ccp), ainsi que des formations courtes sur les thèmes que vous souhaitez approfondir.

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La diversité des tâches à accomplir et des compétences à acquérir en vue d’une installation agricole peut donner le vertige… Les choses s’apaisent lorsque l’on envisage cette transition sur plusieurs années.

du monde agricole. En France du moins, le métier d’agriculteur est très encadré, la législation touffue, les tâches administratives totalement démesurées par rapport à la faible rémunération que l’on tire habituellement de ce métier. Les agriculteurs bio ne sont pas les mieux lotis, loin de là, car le label ab ajoute un niveau de complexité supplémentaire. Autant en prendre son parti et aborder de manière positive et ouverte ces institutions et administrations : vous y rencontrerez nombre de personnes passionnées, sincèrement désireuses de vous épauler. La méfiance que l’on croit parfois percevoir s’explique par le nombre de doux rêveurs, si loin des réalités de la profession d’agriculteur, qu’accueillent les conseillers à l’installation. À vous de démontrer votre crédibilité. Et si certaines portes se ferment au vu d’un projet atypique, persévérez : d’autres s’ouvriront. Le monde agricole est en pleine mutation et les projets qui intègrent le mieux les dimensions environnementale et sociétale sont les projets de demain ! N’hésitez pas à vous adresser de préférence à un interlocuteur expérimenté (inspecteur ou directeur), qui sera plus au fait des tendances.

STATUTS En France, vous pouvez devenir agriculteur selon différents statuts. Il importe de les connaître et d’opter pour celui qui correspond le mieux à votre projet. Votre statut dépendra, entre autres, de votre surface agricole utile (sau)5 et du type de production choisi. Depuis peu, il est possible d’obtenir le statut d’agriculteur à titre principal en fonction du nombre d’heures travaillées par année, ce qui ouvre la porte aux installations sur de très petites surfaces, qui étaient pénalisées jusque-là. Le difficile parcours menant à l’obtention du statut d’agriculteur est décrit en annexe, p. 1020. COUVERTURE SOCIALE En France, le statut d’agriculteur à titre principal vous donne accès à une protection sociale gérée par la Mutualité sociale agricole (msa). Cette dernière fonctionne à peu près comme les autres caisses : les charges sociales sont indexées à vos revenus. D’une manière générale, les cotisations

ne sont pas très élevées, mais les prestations et les retraites ne le sont pas non plus.

FISCALITÉ En France toujours, on peut opter pour différents statuts fiscaux. Le premier choix est une imposition au forfait, calculée selon votre sau et le type de production, ou au réel, calculée selon votre bénéfice (les recettes moins les charges). De nombreuses personnes qui s’installent pensent que l’imposition au forfait sera plus intéressante. C’est souvent un mauvais calcul car cette option a pour conséquence que vous serez imposé chaque année, que vous gagniez quelque chose ou rien du tout. De plus, vous ne pourrez pas immobiliser vos investissements. Or, durant les premières années suivant une installation, on investit généralement beaucoup et l’on ne gagne rien… L’imposition au réel tient compte de vos investissements que vous pourrez immobiliser sur cinq, dix ou vingt ans, ce qui diminuera votre imposition durant les années où vous sortirez la tête de l’eau. Le second choix concerne la tva. Vous pouvez opter pour l’assujettissement à la tva ou non. Là encore, il est souvent judicieux d’opter pour l’assujettissement à la tva, qui vous permettra de la récupérer sur vos investissements et achats, dès lors que vous décidez d’investir de façon importante. La fiscalité est décrite en annexe, p. 1023. La création d’une microferme doit être abordée comme la création d’une entreprise complexe, malgré sa petite taille. L’amateurisme est généralement lourdement sanctionné. Comme vous pouvez le constater, il y a suffisamment de sujets pour s’occuper pendant quelques années ! Est-ce vraiment un problème ? Lorsque l’on embrasse la profession d’agriculteur, on fait un choix à très long terme. Une fois que vous aurez posé des fondations solides et bien pris vos marques, vous pourrez profiter longtemps de votre ferme, et vos descendants peut-être aussi !

F Une personne allongée dans l’herbe savoure la beauté de la vallée du Bec… Il y a fort à parier qu’il ne s’agit pas d’un membre de notre équipe permanente, car le travail est intense et nous laisse rarement le loisir de faire une pause. Mais on peut apprécier la beauté de son environnement tout en s’activant !

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CHAPITRE 83 DEVENIR PAYSAN | 893

LÉGISLATION RELATIVE À LA PROFESSION

EMPRUNTS SUBVENTIONS (DONT LA DOTATION JEUNE AGRICULTEUR)

STATUT D’AGRICULTEUR CONNAISSANCE DES ÉTAPES DU PARCOURS À L’INSTALLATION

FINANCEMENT PARTICIPATIF

BUDGET PRÉVISIONNEL DE FONCTIONNEMENT SUR CINQ ANS

COTISATIONS

ADHÉSION À LA MSA

FINANCEMENT

BUDGET PRÉVISIONNEL D’INVESTISSEMENT

FONCIER

LÉGISLATION

ACQUISITION DE TERRES

ENTRETIEN

SAVOIR PRÉSENTER SON PROJET (SAFER) MATÉRIEL

CAHIER DES CHARGES AB

INSTITUTIONS

AIDES PAC

LES COMPÉTENCES À ACQUÉRIR ET LES TÂCHES À ACCOMPLIR LORS D’UNE INSTALLATION AGRICOLE

AGRICULTURE BIOLOGIQUE

ASSURANCES DU SITE ET DU MATÉRIEL

RESPONSABILITÉ CIVILE BÂTI

ASSURANCES

ÉQUIPEMENTS

PRODUCTION COMMERCIALISATION

COMPTABILITÉ

RÈGLEMENT AB PAR TYPE DE PRODUCTION

ORGANISME CERTIFICATEUR

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07/02/2019 10:55


tome  I

tome  II

tome  III

PERMACULTURE, éCOCULTURE :  LA NATURE NOUS INSPIRE

CULTURES VIVRIèRES ET FORÊTS-JARDINs

CRéEr UNE MICROFERME

Perrine & Charles hervé-gruyer

Le changement climatique s’accélère, la biodiversité s’effondre, notre modèle de civilisation vacille… N’est-il pas temps d’inventer ensemble une nouvelle manière d’habiter la Terre, en nous laissant inspirer par la nature ? À la Ferme biologique du Bec Hellouin, Perrine et Charles Hervé-Gruyer et leur équipe cherchent à subvenir aux besoins des humains tout en prenant soin de toutes les formes de vie. Ils y pratiquent l’écoculture, une nouvelle forme d’agriculture qui imite les écosystèmes naturels. Les recherches scientifiques ont validé les résultats de cette approche qui permet, grâce à des outils manuels simples et efficaces, de produire des légumes et des fruits d’une excellente qualité gustative et nutritive, avec des rendements qui peuvent être dix fois supérieurs, par unité de surface, aux rendements de l’agriculture biologique motorisée. Cette production généreuse s’accompagne d’une rapide augmentation de la fertilité des sols. Une microferme conçue selon l’approche du Bec Hellouin constitue un puits de carbone et une oasis de biodiversité. Plus qu’aucun autre ouvrage à ce jour, ce manuel pratique traite de très nombreux sujets : culture des légumes et des fruits, forêts-jardins, petit élevage, céréales jardinées, outillage, conception d’une microferme sous tous ses aspects… Il s’adresse à tous ceux, amateurs ou professionnels, qui désirent créer une ferme ou un jardin naturel et productif. Il guidera les premiers pas des débutants et accompagnera les professionnels avertis, des années durant.

manuel des jardiniers-maraîchers p e r m ac u lt u r e   -   é c o c u lt u r e   -   m i c r o f e r m e s

Cet ouvrage exceptionnel propose un art de vivre en harmonie avec la Terre. Il permet à chacun de s’engager concrètement en faveur du monde de demain. Créée par Charles et Perrine Hervé-Gruyer en 2003, la Ferme du Bec Hellouin, en Normandie, est devenue une référence internationale en matière de permaculture et d’écoculture. Les recherches qui s’y déroulent ont exercé une profonde influence sur l’agriculture biologique en France et inspiré la création de nombreuses fermes naturelles dans le monde entier.

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FERME du BEC HELLOUIN

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